


Planche Elema © Christie’s Paris 2013 – Planche Delta du Purari © The British M. Oc1936,0720.11 – Planche Kerewa, Goaribari © The British M. Oc1906,1013.277
À travers les dix articles rédigés jusqu’à présent, nous constatons que les premières photographies prises dans le golfe de Papouasie ont rapidement captivé l’attention des visiteurs. Ils furent frappés par les maisons longues et par les planches ornant ces dernières : suspendues à l’extérieur ou soigneusement placées dans des alcôves, souvent accompagnées de crânes humains ou animaux.
Très vite, ils ont également noté la remarquable variété de ces planches, allant de simples formes ovales à des structures allongées. Certaines arboraient des motifs stylisés suggérant une tête ou un corps humain entier, malgré une proportion souvent inhabituelle entre la tête, les jambes et le tronc.
Robert L. Welsch dans son article « Les significations d’une planche votive » dans l’imposant ouvrage Esprits incarnés sous la direction de Virginia Lee-Webb (2015) a tenté de faire le point sur ce sujet.



Planches Urama @ Metropolitan M. resp. 983.604.5 – 983.604.10. – 983.604.5
S’appuyant sur les études de Lewis puis de Williams, il relève que les alcôves des maisons longues des villages des régions Purari et Elema appartiennent chacune à un clan particulier et que les planches votives sont décorées manifestement de motifs claniques. La majorité des clans possédant un emblème totémique, il s’agirait aussi de la représentation d' »esprits » du clan. Si par moment des planches de différents styles se côtoient, l’explication est à rechercher dans les mariages puisque les hommes offraient à leur gendre une de leurs planches rituelles. Welsch parle de « cacophonie visuelle » dans les maisons longues des régions Urama et Era à opposer à la curieuse uniformité stylistique que l’on trouve à l’Ouest, dans l’île de Goaribari ou encore une harmonie foisonnante dans les régions du Purari et d’Elema.
En progressant davantage vers l’Ouest, il semble que les planches votives soient moins répandues, remplacées par des planches de pirogues. Comme nous l’avons mentionné, Gunnard Landtman a documenté cet aspect chez les Kiwai. Certaines planches, suspendues à l’entrée des maisons longues, auraient rempli une fonction communautaire plutôt que clanique. Dans ces mêmes régions, les planches votives cèdent leur place à d’autres objets, tels que les porte-crânes.



Planches Kerewa resp. © The British M. British Oc1906,1013.283 – © Christie’s 2021-Perinet – © The British M. Oc1906,1013.282
Chez les Kerewa autour de l’île de Goaribari et du fleuve Kikori, elles auraient été rarement exposées mais brandies au dessus de la tête en dansant dans certaine cérémonie.
Les planches portent des noms différents selon les régions. On parle ainsi d’Hohàho chez les Elema ; de Kwoi dans le delta du Purari, de Gope chez les Urama, de Titi ebiha chez les Kerewa, particulièrement dans l’île de Goaribari. Mais de manière générale, l’appellation Gope a été retenu par les Occidentaux sans faire trop de distinction.
On a encore parlé d’esprits dansant, le mouvement étant rendu par un genou plus haut que l’autre dans plusieurs types de figures.



Planche Kikori © Sotheby’s New York 2021 – Planche Kerewa © Metropolitan M. – Planche Elema © Metropolitan M.
L’arrivée des missionnaires incita de nombreuses personnes (s’il ne le faisait pas eux-mêmes) à jeter les planches dans l’eau afin de les « refroidir » et ainsi dissiper la « chaleur » émanant de leur puissance symbolique. Malgré cela, la quantité considérable de planches présentes dans les maisons longues permit aux Occidentaux de procéder à des collectes abondantes.

En savoir plus sur Détours d'Océanie
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.