Johannes Wilhelm Lindt : Pionnier de la photographie ethnographique en Australie

© The British Museum Oc, A8.50

Reprenant le tableau établi par Jan Hasselberg dans Historical Photographs from New Guinea 1875-1940, je demeure perplexe devant le nombre de photographes actifs en Papouasie-Nouvelle-Guinée à la fin du XIXᵉ et au début du XXᵉ siècle. Après avoir évoqué Lajos Biró, le hasard m’a conduite sur les traces du photographe allemand Johannes Wilhelm Lindt, installé dès 1863 à Grafton, en Australie, où il débuta comme apprenti dans le studio de Conrad Wagner.

Ce hasard prit la forme d’une visite organisée ce jour par l’association Détours des Mondes des collections de la Société de Géographie, conservées à la Bibliothèque nationale de France. Nous y fûmes accueillis par Olivier Loiseaux, conservateur au Département des Cartes et Plans, responsable des fonds de la Société de géographie. Il nous présenta une sélection de photographies centrée sur la Sibérie et la Mongolie, avant de nous entraîner vers Java puis l’Australie. C’est là, précisément, que nous furent dévoilés les clichés de Lindt…

Des photographies de studio, très stéréotypées… apportant au grand public un certain nombre d’idées préconçues sur l' »inconnu », l' »exotique » et le « sauvage »… Mais revenons au début de l’histoire.

En 1870, Lindt reprit la direction du studio de Wagner et exerça alors le métier de photographe colonial en Australie. Mais il ne se limita pas aux portraits de studio : il entreprenait régulièrement des excursions, transportant son matériel encombrant et fragile jusque dans des hameaux isolés. C’est au cours de ces voyages, vers 1873-1874, qu’il réalisa sa célèbre série d’une soixantaine de portraits des Gumbainggar et Bundjalung, intitulée Australian Aboriginals, qui lui assura une renommée durable comme photographe ethnographique.

Installé à Melbourne en 1877, il ouvrit son propre studio sur Collins Street et acquit une notoriété croissante en immortalisant musiciens, personnalités politiques et figures scientifiques. Dès 1880, il comprit l’impact que l’arrivée des plaques sèches à la gélatine allait avoir sur sa profession. S’adaptant à cette innovation, il convainquit Sir Peter Scratchley, premier commissaire spécial de la Nouvelle-Guinée britannique, de l’embarquer comme photographe officiel lors de l’expédition de 1885 à bord du SS Governor Blackall.

Sir Peter Scratchley, équipage et amis, S.S. « Governor Blackall » in Picturesque New Guinea

Lindt projetait également de publier un ouvrage sur ses voyages, qui parut en 1887 sous le titre Picturesque New Guinea. En réalité, il ne participa que six semaines à l’expédition, contraint de regagner l’Australie en raison de la maladie de son épouse. Mais son ouvrage eut un succès retentissant.


Les thèmes retenus par Lindt pour sa série Picturesque New Guinea sont d’une grande diversité. On y trouve aussi bien des portraits de groupe soigneusement posés que des scènes « plus spontanées » (malgré de longs temps de pose imposés par la photographie de l’époque) de l’expédition.

Quoi qu’il en soit, les clichés réalisés par Lindt en 1885 furent les premiers de Papouasie-Nouvelle-Guinée à être diffusés auprès d’un large public, contribuant ainsi à asseoir sa renommée. Par la suite, Lindt poursuivit ses voyages : il séjourna aux Nouvelles-Hébrides en 1890, puis aux Fidji en 1891, et donna de nombreuses conférences destinées au grand public.

© MAA Cambridge P.99753.VH

L’ouvrage Picturesque New Guinea est disponible en ligne.

Photo 1 : Lakatoi, près d’ Elevala Island, British New Guinea.


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