

Le dernier archipel visité cette année fut celui des Gambier. Mangareva se situe à 1650 kms de Papeete. Arrivée dépaysante puisque l’aéroport est situé sur le motu Totegegie, cette petite bande de terre tout en longueur et qui est éloignée de Rikitea. Une navette assure la traversée qui dure environ 45 minutes.

J’ai évoqué il y a longtemps déjà les sculptures de Mangareva sur ce blog. C’était à l’occasion de l’exposition de 2009 au musée du Quai Branly qui réunissait 12 statues anthropomorphes de ce petit archipel.
Les figures ci-contre sont des copies respectivement de Rongo, divinité mangarévienne de la pluie et des cultures et réalisée par Raufra Nanai en 2011(à gauche) et d’une statue plus abstraite, possible représentation du dieu Rao, invoqué lors de la plantation du curcuma et réalisée par Terani Rangimakea en 2011.
Ces statues sont présentées à l’aéroport de Tahiti.
L’originale de celle de gauche est conservée au British Museum (LMS 99) et celle de droite au musée du Quai Branly (72.53.287).
Cette dernière fut adressée le 20 avril 1836 au père supérieur de la Congrégation des Sacrés coeurs de Jésus et Marie de Picpus de la part du père Caret.
Avec ce dernier nom, nous touchons là à un pan de l’histoire dramatique de l’archipel puisque François Caret accompagnait le père Honoré Laval qui a voulu témoigner, par des bâtiments en dur, de la solidité du catholicisme. Dès lors, la population fut entraînée dans une série de travaux gigantesques sous le joug d’une véritable théocratie bâtisseuse.
On dénombre pas moins de 76 constructions à Mangareva, 23 constructions à Akamaru, 10 constructions à Aukena et 9 à Taravai. Ce sont des chapelles, des églises, un couvent, un pensionnat pour jeunes filles, un pour jeunes hommes, un réfectoire, .. Lorsqu’ils arrivent en 1834, les pères s’installent dans l’île d’Aukena où ils vont réussir à cuire le corail pour obtenir de la chaux. Ils y bâtiront une petite église puis une école.

En scellant un accord avec le jeune roi, Maputeoa, ils vont parvenir à convertir très vite près de 2000 habitants de l’archipel.
Lorsqu’on arrive sur la petite île d’Akamaru, on est tout de suite frappé par une longue allée gazonnée qui a été dégagée depuis le débarcadère. En s’avançant se dévoile sur la gauche une incroyable église comme posée, presque incongrue dans ce décor du bout du bout du monde : Notre Dame de Paix. À l’intérieur, de nombreuses rangées de bancs… il faut préciser que l’île compte 200 habitants !


Photos de l’autrice à Akamaru, septembre 2022
À Akamaru, cette démesure joue peut-être plus encore que dans la capitale, Rikitea, sur l’île de Mangareva qui a vu édifier une cathédrale. Située dans le village même et visible de loin, elle crée un moindre effet de surprise. Elle n’en demeure pas moins le plus imposant bâtiment en dur de Polynésie !

De 1835 à 1836, les pères se sont fait remettre les objets de culte et ont organisé plusieurs autodafés. Tout a été systématiquement brûlé, mis à part quelques oeuvres envoyées en France, à Braine-le-Comte ; et plus précisément onze objets numérotés accompagnés d’une explication. Quelques exceptions cependant comme la représentation de Rongo rapportée par le capitaine Joseph Bonafous-Murat et maintenant conservée au musée de Cahors.
À la mairie de Rikitea, on trouve, trainant dans un coin, une copie de ce dernier.


De nos jours, Mangareva est bien connue pour ses fermes perlières. Mais depuis quelques années, le captage de larves de nacres, nécessaires à la production d’huîtres perlières, connaît une forte diminution ; aussi dernièrement 3 500 nacres ont-elles été réintroduites dans le milieu naturel.


Photos de l’autrice lors de la visite d’une ferme perlière, septembre 2022
À l’est des Gambier, il y a Pitcairn ; plus loin, l’île de Pâques, et puis plus rien jusqu’aux rivages de l’Amérique du Sud…. alors avant de quitter ce fabuleux archipel, quelques belles images pour terminer l’année :