Les missionnaires de la LMS dans le Golfe de Papouasie (1)

Trois hommes portant des boucliers Maiva photo du Rév. William G. Lawes 1881-1889
© British Museum Oc,B26.2

Pour en revenir au début de ces derniers articles, j’étais « partie » pour écrire sur les Arts du Golfe de Papouasie, m’étant aperçue qu’en dehors de cette brève note datant de 2010, je n’avais rien écrit sur les objets ô combien surprenants des sociétés du Golfe. L’un des intérêts pour cette région de Papouasie-Nouvelle-Guinée réside dans l’abondance de clichés que nous possédons et qui sont arrivés très tôt, avec les missionnaires, qui découvraient la richesse et l’intérêt de cet outil.

Ainsi que Virginia-Lee Webb le suggère, on peut distinguer plusieurs périodes dans cette foisonnante documentation photographique : la période « missionnaire » (1874-1912), la période « ethnologique » (1910-1914) et la période 1914-1930 riche de nombreux acteurs tels les agents coloniaux, prospecteurs, négociants et toujours missionnaires et ethnologues. (cf. Esprits incarnés. Planches votives du Golfe de Papouasie, 2016)

Je suivrai donc la chronologie dans les notes qui vont suivre en tentant de fournir les liens bien précieux des premières publications, lorsqu’elles sont en ligne, dans lesquelles on peut retrouver ces photographies.

Les missionnaires « ethnographes » :

L’un des premiers d’entre eux fut probablement le révérend William George Lawes, un missionnaire basé dans le Golfe de Papouasie, qui a établi la station de la London Missionary Society à Port Moresby en 1874. Il entra notamment en contact avec la population Elema. Avec lui on découvrait (photo ci-dessus) d’extraordinaires têtes figurant sur des boucliers conçus pour laisser les bras de celui qui les porte libres pour manier un arc et des flèches. Ci-dessous, ce sont encore des masques Eharo qui arborent ces curieuses figures. Les photographies datent de la période 1881-1889.

Sept masques de Kovave, Motu-motu, photo du Rév. William G. Lawes 1881-1889 © British Museum Oc,B103.15

Les missions de la London Missionary Society se sont implantées largement dans le Golfe et, avec Lawes puis à sa suite, se sont succédés des missionnaires photographes tels les révérends James Chalmers (1841-1901), Harry M. Dauncey (1863-1932) et John H. Holmes (1866-1934).

Le premier de ceux-ci est peut-être le plus célèbre avec son ouvrage paru dès 1885 : Work and Adventure in New Guinea 1877 to 1885 puis Adventures in New Guinea (1886) et Pioneering in New Guinea (1887).

in Missionary Lives. Papua 1874-1914 de Diane Langmore – University of Hawaii Press, 1989.

 En 1893, Chalmers explore à partir de Saguane une partie de la rivière Fly  Il rentre en Grande-Bretagne en 1894–1895 et publie un nouvel ouvrage :  Pioneer Life and Work in New Guinea 1877–1894. De retour en 1896, il tentera d’explorer davantage la rivière Fly mais n’y parviendra pas.  En avril 1900, il est rejoint par un jeune missionnaire, Oliver Fellows Tomkins.

Un an plus tard, ils seront assassinés près de l’île Goaribari. Chalmers possédait alors une grande réputation, il était surnommé le « Livingstone de la Nouvelle-Guinée ». Suite à ce meurtre, les Anglais lanceront une expédition punitive en 1901 suivie d’un autre massacre en 1904, appelé l' »affront » Robinson, une tentative pour récupérer le crâne de Tomkins. Christopher Robinson, alors gouverneur de Nouvelle-Guinée britannique, mena un commando lourdement armé en mars 1904 à Goaribari. Se situant à un tournant de la domination britannique à la domination australienne, les actes de violence de 1904 ont, semble-t-il, fait réagir la nouvelle nation sur son image de puissance coloniale dans le Pacifique. De retour, Robinson fut confronté à une condamnation presque unanime pour son expédition désastreuse, et une commission royale le démit de ses fonctions. 20 juin 1904, Robinson se suicide.
Lire sur ce sujet l’article « A Lesson in Violence: « The moral dimensions of two punitive expeditions in the Gulf of Papua, 1901 and 1904 » par Dario Di Rosa, in Journal of Colonialism and Colonial History, vol18, 2017.

Le British Museum compte 189 objets attribués aux collectes de Chalmers.

Quant à Harry M. Dauncey, il arriva en Papouasie Nouvelle Guinée en 1888 et prit sa retraite en 1928.Pendant ces 40 années, il fut affecté à Delena, un village sur la route du Golfe à partir de Port Moresby mais fit beaucoup d’aller-venues vers Sydney à cause de l’état de santé de son épouse puis de son fils. Quoiqu’il en soit il était très intéressé par les sociétés du Golfe, il rencontra ainsi Alfred Cort Haddon en 1898 ; et a réalisé de nombreuses photographies que l’on peut notamment visionner sur le site. On a quelques précisions sur ses collectes dans l’article The Rare God Figure that ‘Promoted the Growth of Tobacco d’Amy Bolton ainsi que dans mon article de 2013 concernant Le Plymouth City Museum (devenu en 2020 The Box) qui fournit aussi le texte A brief Biography. La base de données du musée recense 423 objets dans la Collection Dauncey

Hisiu Dubu à Delena, photo © H. M. Dauncey 1905-1915 sur le site de University of Southern Carolina N°UC1808163

John Henry Holmes fut missionnaire de la LMS dans trois stations du golfe de 1893 à 1917 : parmi les peuples Elema à Iokea et Orokolo, et à partir de 1904 parmi les peuples Purari, à Urika. Le British Museum possède 261 objets collectés par Holmes et on en trouve également au musée de Liverpool. Son principal ouvrage est In Primitive New Guinea paru en 1924 avec une préface d’Alfred Cort Haddon qu’il a côtoyé tout comme Dauncey.

Planche de l’article Notes on the Elema Tribes of the Papuan Gulf par J. H. Holmes
in The Journal of the Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, Vol. 33-1903

Son dernier ouvrage est Way back in Papua paru en 1926.

Précisément l’article de John Barker : « Way Back in Papua »: Representing Society and Change in the Publications of the London Missionary Society in New Guinea, 1871-1932 » de 1996 dans Pacific Studies 19 revient sur le flot d’articles et d’ouvrages écrits par ces missionnaires-ethnographes, analysant leurs motivations oscillant entre souhaits de connaissances anthropologiques et géographiques et désirs de « propagande ».

À suivre n°2


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