
Lors de mon passage récent dans des musées ethnographiques allemands (Brême, Hambourg et Hanovre), j’ai bien sûr été éblouie par la richesse des collections de Nouvelle-Irlande. On sait que cette île de l’archipel Bismarck (appelée alors Neu – Mecklenburg) fut colonie allemande de 1885 à 1919.
Parmi les rituels Malaggan dont j’ai souvent parlé sur ce blog, j’ai omis d’évoquer les intrigantes figures de craie blanche que sont les Kulap. Souvent peintes (ce qu’on ne voit plus guère dans les exemplaires de musée), elles ont été produites dans la région de Namatanai (soulignée en rouge sur la carte).
Réalisée en très grand nombre entre 1880 et 1910, la majorité d’entre elles n’a jamais dû servir dans des rituels. Le calcaire tendre était abondant dans les lits des rivières serpentant au coeur des Monts Rossel.
Il y eut très tôt une demande de la part des Européens pour acquérir ce type des sculpture comme simple souvenir. Celle de la photographie ci-dessus appartient certainement à cette catégorie puisqu’elle montre un personnage coiffé d’un chapeau à l’européenne.
J’ai longtemps cru que ces statues étaient des représentations de défunts que l’on souhaitaient commémorer mais Michael Gunn (in Nouvelle-Irlande, catalogue de l’exposition éponyme au musée du Quai Branly en 2007) affirme que de telles sculptures intervenaient également lors de cérémonies de fiançailles. Au coeur de la société secrète Langan, ouverte aux jeunes gens et jeunes filles, on leur montrait des statues de la sorte à la fois féminines et masculines lors de leur initiation. Chacun obtenait une de ces statues qui était alors nommée.

Michael Gunn distingue dans le corpus un type particulier qui est celui où les figures présentent un disque autour du cou, ne sachant conclure si ce type appartenait à l’usage « fiançailles » ou « commémoratif » ou aux deux. Il aurait correspondu au collier d’un vêtement composé de feuilles qui s’y attachaient et couvraient les épaules. Il semblerait que ce disque ait disparu dans les effigies réalisées postérieurement à 1883.


Cependant la majorité des figures ne présente pas ce disque. Elles sont soient masculines, soient féminines avec des symboles de mariage comme des bracelets. Il existe encore des couples, parfois figurés par un corps à deux têtes, ou encore des sculptures atypiques comme celle du musée de Leipzig ci-dessous présentant une figure féminine dont les membres inférieurs sont des nageoires !




