De becs et de nez

Masque de Kairiru, PNG © Musée du Quai Branly-Jacques Chrica n° inv. 71.1887.31.83

Une rencontre comme on les aime… Jeudi dernier, Magali Mélandri, responsable de l’Unité patrimoniale Océanie-Insulinde au musée du quai Branly-Jacques Chirac, est venue présenter à l’Institut Giacometti, au sein de l’exposition Alberto Giacometti. Le Nez, un masque de Papouasie-Nouvelle-Guinée provenant précisément de lîle de Kairiru (anc. île d’Urville) au large de Wewak.

Si le rapprochement formel est indéniable avec les oeuvres de Giacometti concernant Le nez, il est relativement sûr que l’appendice du masque soit plus proche d’un bec d’oiseau que d’un nez. Ce type de masque, parfois et abusivement appelé « moustique », se retrouve dans la zone Boiken et s’apparente aux masques souvent dits « à longs nez » de la région de Kopar dans le Bas Sepik. On le retrouve ainsi exposé dans une ancienne vitrine du musée de l’Homme à côté d’autres masques plus ou moins proches du point de vue du style (en haut à droite).

De fait, le masque de Kairiru est entré depuis longtemps dans les collections françaises. Il provient de la collection Roland Bonaparte sur laquelle planent de nombreux mystères. Roland Bonaparte est né à Paris en 1858 et était le petit-neveu de Napoléon Ier. Il s’intéressa d’abord à l’anthropologie et à la géographie, puis il se tourna vers la botanique avec le projet de constituer un herbier gigantesque. Il va notamment présider la Société de Géographie de 1909 à 1924, mais il a fait partie de très nombreuses autres sociétés. À sa mort en 1924, sa fille Marie, princesse de Grèce, légua les millions de spécimens d’histoire naturelle à l’Université de Lyon; sa bibliothèque, cartes et photographies à la Société de géographie (maintenant à la BNF) et bien sûr sa collection d’artefacts au musée de l’Homme.

© René Paquino, 1959 – Musée du Quai Branly- Jacques Chirac, PP0104038

On remarque sur la photographie ci-dessus, le meilleur état du masque (existence de fibres et polychromie plus marquée) que celui affiché de nos jours.

Le masque arrive très tôt dans les collections (en 1887). Il provient donc d’une colonie alors allemande et on ignore comment il a été collecté. Si l’île d’Urville (Kairiru) est mentionnée il n’est pas certain qu’il ait été fabriqué sur place puisque les réseaux d’échange étaient nombreux entre les îles et la côte. Ceci est d’autant plus frappant qu’il est très proche de masques identifiés comme Nagum Boiken, collectés dans la zone côtière des monts du Prince Alexandre.

Il s’apparente aux masques Barak qui évoquent un puissant esprit de la brousse (Parak, Brag ou Barak). Paré d’un costume de fibres végétales, il semble qu’il était présent lors de l’initiation des garçons mais aussi en association avec les rites de chasse.

On rapporte souvent ce type de masque au dessin réalisé par de jeunes garçons de l’école de la mission Murik dirigée par le Père Joseph Schmidt. Ce dernier rassembla témoignages et dessins dans un article intitulé « Neue Beiträge zur ethnographie der Nor-Papua (Neuguinea) » et disponible en ligne dans la revue Anhropos Mai-Août 1933.

Un commentaire sur “De becs et de nez

Ajouter un commentaire

Laisser un commentaire

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑