
Du point de vue des collections ethnographiques, le nom de Woodford est associé à celui de Mahaffy, premier officier de district de 1898 à 1904 mais qui est resté dans le Pacifique occidental jusqu’en 1914. Pendant plusieurs années, les deux hommes ont été les seuls représentants permanents du gouvernement britannique dans les Salomon. Des raids punitifs leur ont permis de pouvoir accéder à un certain nombre d’objets. Ne brossons pas un portrait exclusivement noir de ces deux collecteurs, ils ont probablement « aussi » acheté des objets et ce dans l’idée, qui devait leur sembler louable à leur époque, qui était celle d’une collecte de « sauvegarde ». Ils ont travaillé en étroite collaboration, partageant les informations sur les objets trouvés et photographiant. Leurs images nous apportent de nombreuses informations, telle cette première photographie (antérieure à cette collaboration) où l’on distingue nettement les ornements du chef (notamment son bakeha) et la pirogue, décorée, arborant un de ces fameux musu musu, ces figures attachées à la proue juste au-dessus de la ligne de flottaison des grandes pirogues utilisées pour le commerce et les raids dans les îles occidentales des îles Salomon.

La collection Woodford est maintenant conservée pour sa grande majorité au British Museum (483 objets). On trouve encore quelques objets au World Museum de Liverpool (30), au Pitt Rivers Museum, à l’Australian Museum de Sydney, au Museum of Archaeology and Anthropology de Cambridge, et à la Royal Geographical Society à Londres.
Arthur William Mahaffy est né en 1869 près de Dublin et, après ses études, c’est vers l’armée qu’il se tourne. À la suite de cette première expérience, il est envoyé avec un contrat d’officier dans les îles Gilbert & Ellice, et rejoint Woodford à Tulagi en 1898.
L’histoire de ces deux hommes, leurs collectes et le destin de leur collection sont particulièrement bien détaillés dans la thèse de Aoife O’Brien soutenue en 2011 : Collecting the Solomon Islands: Colonial encounters & Indigenous experiences in the Solomon Island collections of Charles Morris Woodford and Arthur Mahaffy (1886-1915), dont on a la chance de pouvoir consulter une version en ligne.

Pour Arthur William Mahaffy, il s’agit de 530 objets, ramenés en Europe à différentes époques entre 1903 et 1914 qui sont pour une grande majorité conservés au National Museum of Ireland (Dublin). Quelques objets se trouvent aussi au Pitt Rivers Museum d’Oxford et enfin un objet est au Museum Victoria de Melbourne. Mais contrairement à Woodford, Mahaffy a été nommé en différents endroits en dehors des Salomon, résidant dans les îles Gilbert et Ellice, les Nouvelles-Hébrides ou encore dans les Fidji. Il a également acheté des objets de zones où il n’est jamais allé, et sa collection reflète cette diversité géographique (cf. objets ci-dessus).

Quant à l’objet qui se trouve actuellement à Melbourne, il n’est pas des moindres et est exposé dans la galerie « First Peoples ». Il s’agit d’un tomoko (une de ces grandes pirogues) que Mahaffy a donné au musée en 1901.
C’est en 1922, quelques années après la mort de Mahaffy, que sa sœur Rachel chercha à vendre la collection. Elle fut temporairement prêtée au Musée national de Dublin. Après un refus de Von Hügel du musée de Cambridge, elle fut finalement achetée par le musée irlandais pour un montant de ₤170 (le musée l’aurait évaluée au double !).